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Structures agraires et paysages ruraux



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Structures agraires et paysages ruraux

Au Canada comme ailleurs, la mise en valeur de l'espace par l'homme repose essentiellement sur la partition entre la ruralité et l'urbanisation. Parce qu'il s'agit d'un pays « neuf » et parce que les montagnes de l'Ouest sont marquées par une très faible humanisation, les paysages ruraux se circonscrivent aux plaines centrales et aux rivages du Saint-Laurent, à quoi se greffent, dans le Pré- et le Moyen Nord quelques taches correspondant à d'anciens fronts pionniers (Clay Belts) ainsi que quelques secteurs de plaine en bordure des océans.

La principale distinction que l'on opère à propos de l'utilisation de l'espace à des fins agricoles oppose le « rang » québécois au « township » de l'Ontario et des Prairies.

Durant les XVIIe et XVIIIe siècles, la colonisation française a mis en place des concessions en bandes allongées, dans un sens perpendiculaire aux fleuves puis aux routes. Les habitations, installées sur la berge puis le long de la route, s'égrènent à l'origine à portée de fusil les unes des autres. Ces lignes ont reçu le nom de « rangs ». Les premiers ont été établis le long du Saint-Laurent en 1626, soit seulement dix-huit ans après que Samuel de Champlain eut fondé Québec. Peu après, on installa des rangs le long des chemins : lorsque les maisons n'occupent qu'un seul côté, c'est le rang simple ; s'il en existe des deux côtés, on parle de rang double. Ainsi, le terme de rang définit un territoire rectangulaire en lots étirés. Ce paysage agraire se singularise par plusieurs aspects spécifiques : terres de largeur à peu près égale d'une exploitation à l'autre, parcelle d'un seul tenant, résidence de l'exploitant sur son lot, forte densité des voies de communication ainsi que des clôtures. Dans chaque « paroisse » (commune), les terroirs de rangs s'opposent complètement aux lieux de service où l'habitat est concentré. Contrairement à une idée reçue, le rang ne peut être défini comme un type de village même si, dans le paysage, l'assimilation avec le Waldhufendorf est facile à faire. Les premiers lots qui furent concédés le long du Saint-Laurent avaient une largeur de 175 mètres et une profondeur de 2 800 mètres, soit une superficie de 49 hectares. Rapidement, les « rangs d'arrière-fleuve » ont complété les « rangs de fronteau » : à Montréal, en 1702, donc soixante ans après la fondation de la ville, 36 % des rangs étaient localisés à l'intérieur de l'île. Mais, depuis ses origines, ce paysage a fréquemment changé d'aspect : tantôt, par regroupement d'exploitations, on aboutit à une géométrie plus régulière du périmètre possédé ; tantôt, dans le cas contraire (partage entre plusieurs enfants par exemple), les parcelles sont devenues plus étroites, et cela confère au paysage l'allure de « lames de parquet ». C'est à ce stade que l'opposition avec le système du township est la plus flagrante.

Sous le régime britannique, plus particulièrement après 1791, le township (canton) est devenu le mode officiel de division des terres. Celles-ci sont réparties en carrés de 6 miles, 9,65 kilomètres de côté, chaque carré étant subdivisé en trente-six sections de 640 acres (269 ha), elles-mêmes partagées en quatre. Ainsi est né un parcellaire à grands carrés et à habitat dispersé, mais incluant des regroupements sous forme de villages-centres. Répandu à l'origine en Ontario, ce système du township caractérise également le monde des Prairies, où la céréaliculture s'accommode fort bien de vastes parcelles géométriques. On a déjà vu qu'à la mise en place de ce paysage rural le chemin de fer était étroitement associé, à tel point qu'aucune exploitation ne se trouvait, dans le sud des provinces, à plus de 10 miles d'une ligne principale ou secondaire. En réalité, les compagnies ferroviaires ont été prises dans une dynamique qu'elles n'avaient pas prévue : leur but était uniquement d'atteindre le Pacifique. Mais, quand elles ont saisi l'aspect lucratif que pouvait représenter la mise en valeur de ces terres vierges, elles entreprirent la construction d'un canevas assez serré de lignes secondaires. Ces compagnies n'hésitèrent pas non plus à céder à bas prix les terrains localisés près de leurs emprises à condition que les acquéreurs s'engagent à utiliser le rail pour écouler leurs produits. Comme l'action se passe à la fin du XIXe siècle et qu'il n'y a aucune concurrence d'un autre mode de transport, le succès a été immédiat !

De même que l'on a noté une évolution du rang, une mutation du township est également perceptible. Cela principalement en rapport avec des données d'ordre naturel : l'optimisation du paysage du township s'explique par la nature même du sud du Manitoba et de la Saskatchewan, c'est-à-dire des secteurs où bons sols et climat se conjuguent pour faire de l'espace le grenier à blé que l'on sait. Dès lors que l'on s'avance vers le nord, de plus grandes superficies sont indispensables à chaque exploitation pour parvenir à des résultats identiques. D'où un agrandissement des composantes du damier et même l'apparition, sur les franges pionnières, de lambeaux de forêt attestant du caractère en apparence inachevé de la mise en culture et donc de l'utilisation de l'espace.

Par cet aspect, on se rapproche de l'aménagement agricole des Clay Belts, où le principe a été de développer une agriculture de survie en rapport avec l'ouverture de chantiers forestiers ou de concessions minières (Abitibi-Témiscamingue). À la palette des paysages ruraux et des aménagements de l'espace pour l'agriculture, il convient d'ajouter quelques portions de territoires côtiers, tant sur le Pacifique que sur l'Atlantique.

Dans le premier cas, on mentionnera les « bons pays » que représentent le delta du Fraser et le sud de l'île de Vancouver, où la richesse de l'agriculture est très dépendante de l'urbanisation galopante. Ce paysage paisible combinant économie herbagère, élevage laitier et agriculture maraîchère (en partie sous serres) n'a d'égal que celui qu'on rencontre à proximité des littoraux de la Nouvelle-Écosse, dans les vallées de Cornwallis-Annapolis, ou encore sur l'île du Prince-Édouard, réputée pour ses pommes de terre.

Au total, on est frappé, lorsqu'on visite en détail le Canada, par le soin apporté à l'occupation du moindre arpent de terre pouvant être nourricier. Vraisemblablement aussi prévaut, dans la conservation et le développement de l'espace à des fins agricoles, la volonté de démontrer que le Canada est bien davantage qu'un appendice de son voisin méridional. Ce que l'on perçoit également au niveau de l'aménagement de l'espace urbain.



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